Quelques messages et lettres officiels relatifs à la guerre déclenchée le 01.10.1990 contre le Rwanda.
Lettre du Ministre de Cabinet à la Présidence au Premier Ministre daté du 01.12.1992.
REPUBLIQUE RWANDAISE
Kigali, le 1er décembre 1992
PRESIDENCE DE LA REPUBLIQUE
CABINET DU PRESIDENT
Son Excellence Monsieur le Premier Ministre
K I G A L I
Objet : Négociations à ARUSHA
Monsieur le Premier Ministre!
J'ai l'honneur de vous faire communiquer, à la demande du Président de la République, les conclusions qu'il a tirées, suite
aux diverses consultations qu'il avait menées, en particulier avec les partis politiques, les représentants des Eglises, ainsi
qu'avec nos amis étrangers, au sujet des orientations à donner à l'équipe rwandaise de négociations.
Le Chef de l'Etat me prie d'attirer votre particulière attention sur la clarification qu'il souhaite apporter sur les points
et les principes suivants, clarifications qu'il vous demande de transmettre au chef de la délégation rwandaise chargé de mener
à bonne fin lesdites négociations.
Le Président de la République, soucieux de voir les accords aboutir rapidement et d'une manière qui leur assure le soutien
ferme de l'ensemble des forces vives du Pays, insiste une fois de plus sur le besoin absolu d'un consensus, et de la non exclusion,
afin de favoriser par tous les moyens la réconciliation nationale.
En particulier, le Président insiste sur les modalités pratiques de la mise en application des points ayant déjà fait l'objet
d'une entente, et qu'il ne faut donc point, par conséquent, réexaminer.
Ainsi, pour ce qui est du partage du pouvoir pendant la période de transition, dont la durée ne devrait en aucun cas
dépasser douze mois, pouvant ainsi coïncider avec la fin de la législature en cours, il s'agira de rechercher un équilibre réel
au sein du gouvernement de transition élargi, afin d'éviter qu'un seul groupe de sensibilités politiques puisse s'approprier une
majorité permanente de deux tiers des sièges ouverts.
Cela pourrait se faire, par exemple, par l'association à ce nouveau gouvernement de transition élargi d'autres sensibilités
que celles des partis politiques composant l'actuel Gouvernement de transition. De plus, devraient être clarifiées les modalités
de fonctionnement du gouvernement de transition élargie, en cas d'absence de certains de ses membres.
Un certain nombre de facteurs rendant problématique l'organisation d'élections législatives et présidentielles, dont l'échéance
coïncidera évidemment avec la fin de la période de transition, il faudra tout faire pour que des élections communales puissent être
organisées rapidement, afin de mettre un frein à l'insécurité régnant dans nos communes, et qui est grandement le résultat de la
contestation ou de l'absence d'autorités locales dûment légitimées par la population.
En ce qui concerne la nomination des membres de l'organe législatif de transition, le même principe d'équilibre et d'équité
entre les diverses sensibilités politiques devra être de mise, alors qu'il faudra simultanément décider du sort des députés actuels,
légalement investis dans leurs fonctions jusqu'à la fin de la législature actuelle.
Le Président de la République insiste en outre sur l'absolu besoin de prévoir les modalités d'application réalistes des accords
conclus, ainsi qu'une chronologie réaliste des événements dans la mise en application des accords, afin de garantir une véritable
réconciliation nationale, qui est l'objectif principal.
Enfin, une attention particulière devra être accordée par l'équipe de négociation aux mécanismes d'approbation des accords
conclus (soit par un référendum, soit par l'adoption par l'actuel C.N.D.), afin de s'assurer que les accords auront force de loi,
que la population les endosse pleinement et les vivra avec conviction.
En formulant ces orientations et ces propositions, le Chef de l'Etat, convaincu qu'elles permettront de débloquer et de faire
aboutir rapidement et avec succès les négociations en cours, exprime sa certitude que vous les partagerez pleinement, motivé par
le seul intérêt national, car le retour à la paix et à la tranquillité publique, la réintégration des personnes déplacées, l'accueil
des anciens réfugiés, le respect des traditions démocratiques, et la reprise rapide du développement national exigent que les
négociations soient menées à bonne fin, assurées d'obtenir le consensus national, sans exclusion aucune.
Le Président vous saura gré, Monsieur le Premier Ministre, pour une suite appropriée et urgente.
RUHIGIRA Enoch
Directeur de Cabinet
Copie pour information à :
- Monsieur le Ministre des Affaires
Etrangères et de la Coopération
K I G A L I .