Quelques messages et lettres officiels relatifs à la guerre déclenchée le 01.10.1990 contre le Rwanda.
DISCOURS DU GEN.-MAJOR JUVENAL HABYARIMANA, PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE RWANDAISE DEVANT LA 27e SESSION
DE LA CONFERENCE DES CHEFS D'ETATS ET DE GOUVERNEMENT DE L'ORGANISATION DE L'UNITE AFRICAINE, A ABUJA (NIGERIA), LE 04 JUIN 1991.
Monsieur le Président,
Messieurs les Chefs d'Etats et de Gouvernement,
Messieurs les Chefs de délégation,
Distingués Délégués,
Mesdames, Messieurs!
J'aimerais tout d'abord, me joindre à l'hommage chaleureux que nous rendons au Général BABANGIDA pour son élection convainquante
à la Présidence de l'O.U.A., en l'assurant du soutien total de mon pays, le Rwanda, dans les efforts qu'il entreprendra pour la mise
en place des solutions aux grands problèmes de l'Afrique, ainsi que de la conviction de mon pays, selon laquelle, en tant que nouveau
Président de l'O.U.A., le Général BABANGIDA sera en mesure de veiller au respect des principes sacrés de notre Organisation, et de
défendre les justes causes de nos pays.
Monsieur le Président!
Si le Rwanda a demandé la parole, c'est qu'il voudrait, pour commencer porter à votre connaissance, et à celle de tous les Chefs
d'Etat et de Gouvernement, l'extrême gravité de la guerre lancée, le 1er octobre 1990,contre le Rwanda, à partir de l'Ouganda, avec
la participation active et massive de l'armée de ce pays, puisque, selon les dires même de l'ancien Président de l'O.U.A., l'invasion
armée du Rwanda était conduite par les meilleurs combattants de l'armée ougandaise, la N.R.A., du commandant en chef des assaillants,
le général Fred Rwigema, commandant adjoint de l'armée ougandaise et Ministre adjoint de la Défense, aux officiers menant les troupes
composées d'environ dix milles soldats.
La première tentative d'explication avancée par les agresseurs fut le prétendu refus du Gouvernement rwandais d'accepter le
retour des Rwandais ayant fui leur pays, à la fin des années 50, suite à la lutte du peuple rwandais pour l'Indépendance
nationale et l'instauration d'un régime républicain.
Je tiens, Monsieur le Président, à vous démontrer que ces allégations n'avaient aucun fondement.
Déjà en 1960, le Gouvernement provisoire du Rwanda, donc avant même l'accession du Rwanda à l'Indépendance (le 01/07/1962),
avait créé un Ministère des Réfugiés, chargé d'assurer le rapatriement et l'accueil des réfugiés qui voulaient revenir au Rwanda,
une amnistie générale ayant été décrétée le 31 mai 1961 en vue de faciliter ce retour et la participation des rapatriés au
processus démocratique.
Le Référendum du 25 septembre 1961, supervisé par les Nations Unies, a vu le rejet massif par le peuple rwandais du régime
féodo-monarchique, ce qui a provoqué l'exil des dignitaires de ce régime et leurs sympathisants, décidés à organiser une lutte
contre le jeune régime républicain.
Malgré les appels solennels et répétés, lancés dès les débuts de la 1ère République par la voix de son Président, Grégoire
KAYIBANDA, malgré l'assistance proposée par le Haut Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés (H.C.R), les extrémistes
réfugiés continuèrent à organiser des attaques contre le Rwanda durant toutes les années soixante, avec l'objectif explicite
de reprendre le pouvoir par les armes.
La IIe République a vu le jour le 5 juillet 1973; ramenant ka paix et la concorde nationales, alors fortement menacées, et
recherchant avant tout l'unité nationale, elle a permis au peuple rwandais de vivre en paix pendant 17 ans et de jouir d'un
réeldéveloppement socio-économique, par tous les observateurs reconnu.
La volonté de la IIe République de résoudre définitivement le problème des réfugiés rwandais ne peut pas non plus être
prise en défaut.
En 1974 déjà fut créée une commission mixte rwando-ougandaise sur le rapatriement des réfugiés rwandais vivant en Ouganda;
malheureusement, pour des raisons tout à fait indépendantes de la volonté du Rwanda, les travaux de cette commission furent par
la suite interrompus.
En 1988, un Comité ministériel conjoint rwando-ougandais sur le problème des réfugiés rwandais vivant en Ouganda fut mis sur
pied, alors que le Gouvernement rwandais, décidé de trouver une solution définitive et durable à ce problème tragique, mit en
place une Commission spéciale sur le problème des Emigrés rwandais.
La troisième réunion de ce Comité ministériel conjoint rwando-ougandais, à laquelle le H.C.R. et l'O.U.A., notre Organisation,
ont pris part, après avoir organiser des réunions d'experts préparatoires, eut lieu du 27 au 30 juillet 1990 c'est-à-dire, tout
juste deux mois avant l'invasion du Rwanda; elle avait permis d'entente avec les deux Gouvernements, et sous les auspices du
H.C.R. , de se mettre d'accord sur une enquête auprès des réfugiés eux-mêmes pour connaître leurs désidérata en face des trois
options leur proposées, à savoir, le rapatriement volontaire au Rwanda, leur établissement définitif en Ouganda avec
naturalisation, ou une troisième option de leur choix.
Le Comité ministériel rwando-ougandais, en coopération avec le H.C.R, devait se réunir à nouveau en janvier 1991, afin de
finaliser et entériner les solutions retenues, sur la base des résultats de l'enquête. Entre-temps, un groupe de réfugiés devait
visiter le Rwanda pour se rendre compte de ses réalités socio-économiques et politiques et rapporter leurs impressions à leurs
frères et sœurs afin qu'ils puissent prendre leurs décisions en connaissance de cause.
Cette visite, prévue de fin septembre à la mi-octobre, fut annulée unilatéralement, au dernier moment, et à sa place eut
lieu, le 1er octobre, l'invasion armée que vous savez.
Monsieur le Président !
Le Rwanda, au moment de son Indépendance nationale recouvrée, en 1962, ne comptait qu'environ deux millions d'habitants.
Le problème des réfugiés rwandais datant essentiellement de cette époque, il est facile de calculer le nombre de ceux ayant
préféré s'exiler dans la foulée de la lutte pour l'avènement de la République, lorsque l'on se rappelle qu'il ne pouvait s'agir
que d'une fraction de la partie déjà fortement minoritaire au sein du peuple rwandais, qui pouvait, le cas échéant, être
identifiée au régime féodo-monarchique. Le chiffre, avancé par certains, de plus de deux millions de réfugiés rwandais voulant
rentrer au pays n'est pas seulement aberrant, mais décidément mystificateur.
Il est un fait cependant que beaucoup de Rwandais, sous la terrible pression démographique et la raréfaction des terres, ont
émigrés dans les pays voisins du Rwanda, et cela depuis fort longtemps déjà ; il vous souviendra, Monsieur le Président, que le
Rwanda avait été amputé d'une partie importante des territoires qui étaient les siens jusqu'au début de la première guerre
mondiale, ce qui fait que des présences importantes de communautés rwandophones existent aujourd'hui dans la région, en
particulier dans la partie méridionale de l'Ouganda, et qui ont constitué le terrain d'accueil par excellence des Rwandais
émigrant pour des raisons économiques.
Aujourd'hui, le Rwanda compte presque huit millions d'habitants ; c'est le pays le plus densément peuplé de notre continent
et connaissant l'un des taux d'accroissement démographique le plus élevé du monde ; dans plusieurs parties de mon pays, la
densité démographique est de plus de 1000 habitants par km².
Monsieur le Président !
Le problème des réfugiés rwandais est d'abord un problème du Gouvernement et du peuple rwandais. A plusieurs occasions,
notamment encore lors des divers Sommets sous-régionaux, et en particulier celui de Dar-Es-Salaam, le Gouvernement rwandais,
tout en regrettant amèrement que la guerre d'octobre ait interrompu brutalement la mise en place des solutions définitives
entrevues, a exprime sa conviction selon laquelle le rapatriement volontaire de tout réfugié rwandais est un droit légitime et
un facteur de paix et de réconciliation.
Le Rwanda en a accepté toutes les implications ; pour cela, le Rwanda a renforcé ses dispositions pour faciliter le retour
harmonieux de ceux des réfugiés qui en exprimeraient le souhait, et sollicité le concours évidemment indispensable de la
communauté internationale.
Monsieur le Président !
Dès qu'il s'est rendu compte que le prétexte avancé pour " légitimer " devant le monde l'invasion du Rwanda, à savoir, le
problème des réfugiés, n'avait plus prise sur l'opinion africaine et internationale -et dans plusieurs de ses communi-qués
ultérieurs, le Front Patriotique dit rwandais a clairement mentionné que le problème des réfugiés n'était point sa
préoccupation - l'agresseur du Rwanda a mis le débat sur le plan de défense de l'idéal démocratique, en essayant de faire
accroire que son action était motivée par sa volonté d'instaurer la démocratie au Rwanda.
Monsieur le Président !
Apporter la guerre, le sang et la destruction, sous prétexte d'introduire la démocratie, alors que, bien avant que
l'agresseur n'eût essayé d'envahir et de conquérir notre pays par les armes, l'aggiornamento politique était considéré comme
une priorité pour la législature en cours, et qu'une commission nationale, composée de toutes les sensibilités politiques,
avait comme tâche de préparer toutes les réformes politiques annoncées - cela ne peut berner personne.
Entretenir une guerre, pour favoriser la démocratie, alors que le Parlement rwandais a endossé, après de longues semaines
de débats, le projet de la nouvelle constitution rwandaise, légitimant le pluralisme politique, et que le pluralisme est déjà
une réalité, ne fait qu'exposer, dans toute leur crudité, les visées spécieuses des assaillants du Rwanda pour ce qu'elles sont,
à savoir, une tentative de renverser la République pour y établir un régime féodo-monarchique, comme tous les témoignages et
documents en notre possession le prouvent.
Monsieur le Président !
Le peuple rwandais, et avec lui tous les observateurs avertis, sont aujourd'hui unanimes pour dire que c'est parce que le
problème des réfugiés rwandais en Ouganda était sur le point d'être résolu définitivement, que c'est parce que l'ouverture
politique et le renforcement démocratique étaient engagés d'une manière irréversible, que c'est parce que l'économie rwandaise
était sur le point d'être relancée, grâce à un accord utile, signé justement en septembre avec les institutions dites de Bretton
Woods - c'est parce que toutes ces solutions étaient en vue que l'adversaire a choisi d'attaquer, puisque la mise en place de
ces solutions ne l'aurait évidemment guère arrangé.
Faut-il vraiment, Monsieur le Président, que le peuple rwandais serve de victime à des visées régionales expansionnistes, à
des aspirations hégémoniques, de quelque sorte qu'elles soient ?
Pourquoi, Monsieur le Président, le peuple rwandais devrait-il être l'exutoire à la solution de problèmes internes d'autres
pays ?
Monsieur le Président !
Cette guerre de malheur, cette tragédie, continue d'une façon insidieuse, alors que, dès fin octobre, les assaillants avaient
déjà été entièrement repoussés.
Installé, sur territoire ougandais, n'ayant aucune base au Rwanda même, comme tous les témoignages l'attestent, puisque la
frontière rwandaise est parfaitement accessible partout, l'ennemi, depuis plusieurs mois, est réduit à s'infiltrer, à la faveur
de la nuit, pour détruire, ou voler, tout ce qu'il peut détruire et voler, avant de se replier chez lui, sous les assauts de
l'armée rwandaise qui lui inflige régulièrement des pertes importantes ; très souvent aussi, il bombarde, à partir de ses
positions ougandaises, avec des équipements puissants, les régions frontalières au Nord du Rwanda.
Ce n'est pas le moindre des aspects diaboliques de cette agression que de voir les assaillants avoir massivement recours,
pour leurs infiltrations, à des adolescents, les envoyants ainsi vers une mort quasi certaine.
Ayant passé le plus clair de leur vie de jeunes adultes dans la guérilla, voulant faire tourner la roue de l'Histoire dans
le sens contraire à l'évolution, ces assaillants, des descendants de nostalgiques de l'ancien régime féodal, perpétuent ainsi
la tradition de ces réfugiés extrémistes qui dans les années soixante déjà ne cessaient d'attaquer la République rwandaise.
Mais, en faisant cela, ils servent, hélas, consciemment ou inconsciemment d'autres desseins.
Monsieur le Président !
Le Rwanda a fait tout ce qui était en son pouvoir, profondément convaincu que l'arrêt des hostilités était la condition
essentielle à tout règlement de ce conflit, afin que soit mis fin à l'absurdité des tueries, aux souffrances indicible d'une
population innocente, et à la destruction du patrimoine écologique et économique du pays et de la région.
Le cessez-le-feu, proposé à intervalles réguliers, inconditionnel et immédiat, l'agresseur du Rwanda ne l'avait ni accepté,
ni, à fortiori, respecté, malgré les nombreuses assurances données, et les engagements pris. Rappelons que l'ex-Président de
l'O.U.A. avait tant de fois affirmé, publiquement, que jamais quiconque, à partir de l'Ouganda, ne pourrait attaquer le Rwanda.
C'est cette assurance formelle que le Président MUSEVENI avait renouvelée au Maréchal MOBUTU SESE SEKO et à moi-même, lors de
notre rencontre tripartite, le 11 septembre 1990, à Kampala, soit deux semaines et demie avant l'invasion armée, dirigée
précisément par certains des plus hauts responsables de son armée.
Même l'accord de cessez-le-feu, recommandé par le Sommet régional de Dar-Es-Salaam, préparé grâce à l'impulsion et à la
médiation du Maréchal MOBUTU SESE SEKO, et signé à N'SELE (Kinshasa), le 29 mars 1991, en présence du Président MOBUTU et du
Secrétaire général de l'O.U.A., Ndugu SALIM AHMED SALIM , même cet accord n'eut aucun effet.
Il a été violé par l'agresseur dès le lendemain de sa signature, et depuis presque tous les jours, par ses attaques dans
nos communes frontalières, par ses bombardements, par-dessus la frontière, des villages frontaliers.
Monsieur le Président !
Le monde entier est témoin des engagements pris par le Rwanda, et du respect scrupuleux avec lequel il les tient ; sa
performance en matière du respect des droits de la personne, parfaitement transparente, est tout à l'honneur du Rwanda, comme
nombre d'observateurs tant individuels qu'institutionnels l'attestent volontiers.
Le Rwanda, Monsieur le Président, s'est aussi engagé, une fois que le cessez-le-feu sera respecté et définitif, une fois
que le désarmement des agresseurs aura été parfaitement accompli, une fois que la paix aura été restaurée intégralement et
durablement, une fois que ces conditions, somme toute minimales, seront réunies, à déclencher dans les meilleurs délais un
élan de pardon national dont il voudra qu'il scelle alors définitivement la paix dans notre pays et dans notre région.
Le Rwanda, comme vous le savez, a pris bien d'autres initiatives encore, toutes destinées à ramener la paix dans la région,
mais sur lesquelles je ne voudrais pas revenir aujourd'hui.
Le peuple rwandais, Monsieur le Président, avait beaucoup compté sur le recours que lui offrait l'O.U.A., le concours
qu'elle lui apportera pour faire taire les armes.
Lors du Sommet de Gbado-Lite, le 26 octobre 1990, il avait été convenu de mettre en place une force panafricaine
d'interposition.
Il convient peut-être de rappeler que des pays amis occidentaux, tous sincèrement intéressés à la stabilité et à la paix
dans cette région du monde et désireux d'éviter un embrasement régional généralisé, s'étaient immédiatement offerts pour
financer une telle force d'interposition panafricaine.
La mise en place d'un Groupe d'Observateurs Militaires n'a pas empêché les agissements criminels continus des agresseurs,
imposant à une population innocente des souffrances indicibles, et des destructions écologiques et économiques considérables.
Monsieur le Président !
Aujourd'hui, devant tous les Chefs d'Etats et de Gouvernements ici réunis, le Rwanda invite, à nouveau, ses agresseurs à
déposer leurs armes, à abandonner cette guerre absurde, ces infiltrations insensées ; le Rwanda les invite à revenir au pays,
dans le cadre de l'amnistie accordée à ceux rentrant au pays en déposant leurs armes, et à participer à une autre lutte,
pacifique, celle-ci, en faveur de l'avancement de notre démocratie et du développement de notre pays, de notre région.
Le Rwanda tend la main aussi à ceux qui ont soutenu et qui continuent à soutenir ses agresseurs, en les priant instamment
de mettre fin à ces hostilités, en privant les agresseurs de leur appui qui seul a permis à ces derniers de lancer cette guerre
fratricide et de continuer leurs actions insanes. Comment ne serait-il pas concevable que l'Ouganda et le Rwanda, ayant tant
d'intérêts et une histoire en commun, ne puissent pas éliminer ces malentendus, enterrer les équivoques, et joindre leurs
forces pour le plus grand intérêt d'un développement régional harmonieux ?
Monsieur le Président,
Messieurs les Chefs d'Etats et de Gouvernement,
Messieurs les Chefs de délégation,
Distingués Délégués,
Mesdames, Messieurs!
Je voudrais, au nom du peuple rwandais tout entier, demander à la présente Conférence de prendre les mesures nécessaires
pour faire cesser l'agression contre le Rwanda, en enjoignant l'Ouganda de désarmer les agresseurs se trouvant sur son territoire.
Je voudrais, au nom du peuple rwandais, au nom du Gouvernement rwandais, demander à la présente Conférence de Chefs d'Etat
et de Gouvernement d'adopter les mesures appropriées permettant de contribuer à l'arrêt immédiat des combats, en mettant
notamment en place une force africaine d'interposition.
La mise en place d'une telle force d'interposition, ou de tout autre moyen de pression et de contrôle efficace, permettant
d'arrêter toute nouvelle attaque contre le Rwanda, est d'autant plus nécessaire et urgente que nous croyons savoir qu'une
nouvelle, et beaucoup plus violente offensive, est en cours de préparation contre le Rwanda, à partir de l'Ouganda.
J'aimerais dénoncer, avec toute la vigueur possible, de tels plans, en adjurant cette Assemblée d'exercer toute son autorité
et son prestige sur ceux qui envisageraient une nouvelle invasion du Rwanda, et qui ne pourrait résulter que dans d'effroyables
souffrances et de grandes destructions.
Le Rwanda s'est toujours demandé comment ses agresseurs et ceux qui les encouragent, peuvent croire s'attirer les sympathies
du peuple rwandais qu'ils prétendent libérer, alors qu'ils en tuent les enfants et détruisent ses acquis, à moins que ce soit
effectivement des mobiles annexionnistes ou autres qu'ils poursuivent.
Voilà pourquoi j'aimerais, pour finir, demander aux Responsables de l'O.U.A. d'appuyer les efforts remarquables, de médiation
et de conciliation, fournis personnellement par le Président MOBUTU, à qui je tiens ici à rendre un hommage sincère, au nom du
peuple rwandais, et en mon nom personnel.
Le Rwanda, Monsieur le Président, n'a jamais exclu des négociations politiques avec l'agresseur, au contraire, mais à
condition que les armes se soient tues.
C'est dans ce sens que le Rwanda, dans l'accord de cessez-le-feu à N'SELE, n'avait pas seulement accepté le principe de
négociations politiques avec le F.P.R., mais même favorisé une date assez rapprochée pour leur tenue, à savoir, quinze (15)
jours après l'arrêt total du bruit des armes, c.-à-d., deux semaines déjà après la date du cessez-le-feu, une fois devenu
parfaitement effectif.
Mais force est de constater, Monsieur le Président, que ce cessez-le-feu n'a absolument pas été respecté par l'agresseur,
pour la simple raison probablement que, comme il ne se trouve plus dans le pays depuis fin octobre, il le viole pour essayer
d'occuper ne serait-ce que quelques mètres carrés de notre territoire.
Force est de constater aussi que pour l'instant le Rwanda ne connaît même pas les véritables revendications de ce Front,
constatant simplement que celles-ci semblent varier dans le temps, et que ceux qui parlent en son nom changent continuellement,
tenant des langages différents, et surtout que ceux qui chargés de prendre les engagements sont constamment pris en défaut par
ceux qui chargés de prendre toute évidence tirent les ficelles dans l'obscurité.
Voilà pourquoi je me permets de suggérer que l'O.U.A. constitue une commission spéciale ad hoc, habilitée à faire une enquête
approfondie sur les événements du mois d'octobre et en particulier sur la situation prévalant depuis la signature du cessez-le-feu
de N'SELE, commission ad hoc et qui serait chargée aussi de nous assister en appuyant, par sa participation, les négociations
entre le Zaïre, l'Ouganda et le Rwanda, et les représentants du F.P.R., et d'y inviter, le cas échéant, des observateurs neutres,
afin que ce conflit, en toute transparence, puisse être définitivement résolu, et la voie vers le progrès de notre région relancée.
Le peuple rwandais, et son Gouvernement, et avec eux toutes celles et tous ceux qui sont foncièrement attachés à la paix
dans notre région vous sauront ainsi gré de prendre les mesures qui s'imposent pour décourager toute velléité d'hégémonie ou de
conquête régionales, et rétablir une paix durable dans notre région.
L'enjeu, c'est le respect des valeurs qui sont à la base de l'Organisation de l'Unité Africaine, c'est le respect de la vie
humaine, celui de la dignité des peuples. Au fond, il s'agit de notre crédibilité, de la crédibilité de l'Afrique toute entière.