Quelques messages et lettres officiels relatifs à la guerre déclenchée le 01.10.1990 contre le Rwanda.
MESSAGE ADRESSE A LA NATION PAR LE PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE RWANDAISE LE GENERAL-MAJOR HABYARIMANA
JUVENAL AU CONSEIL NATIONAL DE DEVELOPPEMENT EN DATE DU 13 NOVEMBRE 1990.
Mesdames et Messieurs les Membres du Corps Diplomatique et Consulaire,
Mesdames et Messieurs les Députés,
Rwandaises et Rwandais,
Amis du Rwanda !
Il me fait particulièrement plaisir d'être parmi vous aujourd'hui, et de pouvoir m'adresser à vous dans l'enceinte de notre
Parlement, le Conseil National de Développement, l'organe législatif par excellence, de toute démocratie qui se respecte.
Si aujourd'hui, Militantes et Militants, je préfère m'adresser au peuple rwandais, à travers ses représentants démocratiquement
élus, c'est que les deux sujets principaux dont je voudrais vous entretenir ont trait à la problématique de la relance de notre
économie, et au renforcement de la démocratie dans notre pays.
En effet, la guerre que l'égarement de gens obnubilés par le rêve d'un retour armé aux prérogatives monarchiques féodales
d'un passé définitivement révolu a imposé à notre pays - cette guerre a non seulement compliqué notre situa-tion économique,
par la destruction partielle d'un potentiel de croissance économique et le relantissement, parfois considérable, et, au vu de
l'action militaire des ennemis de notre pays, évidemment inévitable, de nombre d'activités économiques; elle a aussi retardé la
mise en place du dispositif de croissance que nous avons envisagé de vous proposer.
En réalité, comme les assaillants l'avaient clairement déclaré, et comme ils continuent à le déclarer publiquement dans les
média occidentaux, leur objectif est de paralyser au maximum l'économie de notre pays, et de continuer à le faire.
A ce rêve absurde de prise de pouvoir par une infime minorité, totalement coupée des réalités de notre pays, à ce rêve absurde,
et combien tragique, l'Armée Rwandaise, et la détermination farouche de toute notre population de rejeter ces attaquants INKOTANYI,
par essence anti-démocratiques, ont mis un terme, et que nous esperons définitif.
Voilà pourquoi nous devons, à la population rwandaise, à toutes les Miltantes et tous les Militants, à noa Forces Armées, à
tous les membres qui les composent, et surtout à ceux qui ont risqué leur vie, qui ont perdu leur vie pour la sauvegarde de la
paix nationale, pour la sauvegarde de notre patrimoine, pour la sauvegarde des acquis précieux de trente ans d'indépendance et
de consoli-dation nationales - nous leur devons, Rwandaises et Rwandais, Amis du Rwanda, notre gratitude la plus profonde!
Ils ont sauvé notre pays d'une guerre civile; ils ont sauvé notre pays de la destruction économique; ils ont ramené la paix
dans notre région et évité ainsi un embrasement régional, une conflagration généralisée, qui, pour quiconque moindrement au
courant de la réalité vraie, de notre pays, de notre région, ne pouvaient qu'être synonymes de souffrances indescriptibles,
synonyme aussi de la création d'un nouveau foyer continental de misère, de sang et de destruction.
Accordons à la mémoire de nos soldars morts au combat quelques instants de silence et de prière.
Mesdames et Messieurs les Députés,
Rwandaises et Rwandais,
Amis du Rwanda!
Le moment est venu de concentrer à nouveau toute notre attention sur la relance de notre économie.
Comme vous le savez, comme nous le savons, le Gouvernement Rwandais a de tout temps mis son engagement et toute sa fierté
dans la promotion d'un développement économique authentique, qui nous garantirait à la fois une certaine marge de manœuvre,
une certaine marge d'indépendance, indissociable de l'idée que nous faisons de la dignité nationale, élément qui laisserait
aux générations qui nous suivront le maximum d'options ouvertes, un auto-développement enfin et surtout dont la croissance prend
racine dans la valorisation de nos ressources en réponse à la satisfaction première de nos besoins, tout en nous permettant
de dégager des surplus exportables indispensables, un auto-développement écono-mique qui accorde la plus haute importance à
l'augmentation du pouvoir d'achat en milieu rural, à la défense du producteur, de tous les producteurs, agricoles, artisanaux
et industriels, mais d'une manière privilégiée du petit producteur en milieu rural, dont toute notre économie dépend d'une
manière existentielle.
Mais de cela, je vous ai déjà longuement entretenus, à tant d'occasions. Aujourd'hui, j'aimerais, à ce sujet, simplement
vous redire ma conviction intime, comme je l'ai dit si souvent et en particulier le 15 juin 1987, dans la synthèse que j'ai
tirée de mes rencontres avec l'ensemble des fonctionnaires et du personnel politique, selon laquelle plus élevé le niveau
général de sensibilisation nationale, à chaque échelon, pour chaque individu - qu'il soit adulte ou jeun, médecin, juriste ou
musicien, chimiste, infirmière, ménagère, vendeuse, écrivain ou opérateur économique - que plus élevé le degré de perception
et de la maîtrise conceptuelle, c'est-à-dire, de la sensibilisation aux problèmes économiques nationaux, plus sera élevé le
degré d'intériorisation de la compréhension de la réalité vraie de notre économie, et plus vite avancera notre pays, plus
facilement comprendrons-nous ses défis et ses contraintes fondamentales, plus vite trouverons-nous les solutions à nos problèmes
économiques, mais aussi à bien d'autres encore, et cela grâce à une vision partagée, et sans cesse approfondie, de notre
auto-développement qui nous permettra de penser " cohérence", de penser " urgence ", de penser " intérêt national bien compris ",
et cela pour tout ce que nous entreprenons.
Cette vérité, cette conviction qui est la nôtre, restent plus vraies que jamais, si nous voulons avoir une chance de sortir
de la crise économique qui, d'une violence encore jamais vue, frappe les économies africaines, et la nôtre en particulier.
Militantes et Militants !
La décennie des années 80 a été, pour les pays africains qui restent si périphériques par rapport à tout, une véritable
succession de crises écono-miques, les unes plus violentes que les autres.
Notre pays a fait face à ces crises avec le maximum de détermi-nation, en renforçant ses acquis, tout en avançant sur beaucoup
de plans, en faisant tous les jours un petit pas dans la bonne direction ; notre pays a aussi, et tout le monde semble vouloir
l'en féliciter, réussi grâce à un sursaut de rigueur et d'austérité, et une cohérence toujours meilleure des politiques de
développement, jusqu'à présent, à sauvegarder l'essentiel de ses équilibres macro-économiques, et à toujours rembourser rubis
sur ongles ses dettes.
Notre économie a sans cesse été la victime d'événements sur lesquels nous n'avons eu aucune prise ; quelque ait pu être le
sérieux avec lequel nous avons géré notre économie - et nous nous en sommes rendus compte avec amertume - quelles que soient la
cohérence et la justice de nos approches en matière de développement économique, le système économique international, caractérisé
par de puissants intérêts, nous reste foncièrement hostile, nous assénant successivement des coups extrêmement pernicieux, jusqu'à
nous enlever cette stabilité financière existentielle minimale, grâce à laquelle nous pourrions envisager, avec confiance, la
restructuration et la modernisation de notre économie.
Il y eut, de 1985 à 1987, la première chute massive des cours mondiaux des trois produits faisant la presque totalité de nos
exportations, à savoir, le thé, l'étain et le café, chute qui a réduit considérablement nos recettes d'exportation, nous privant
par-là d'autant de moyens de renforcer intrinsèquement notre potentiel de production, tout en affaiblissant notre capacité
financière nationale.
Nous avions pourtant réussi à nous ajuster parfaitement bien à cette première chute massive des cours de nos produits
d'exportation, tout en maintenant un niveau élevé de réserves en devise et en activité économique relativement forte.
Une nouvelle, et catastrophique, chute du prix du café, déjà fortement déprécié par rapport à sa moyenne historique, est
intervenue immédiate-ment après l'abolition de l'accord international sur le café, le 1er juillet 1989 ; elle a privé notre
économie, en l'espace de quelques jours, des deux tiers environ, supplémentaires, de nos recettes d'exportation, déjà fortement
réduites.
C'est dans ce contexte que le Gouvernement Rwandais organisa, en octobre 1989, le séminaire de l'AKAGERA réunissant la plupart
des cadres de l'administration pour qu'ils se penchent sur la problématique économique nouvelle créée par l'écroulement si soudain
et si extrême de nos recettes d'exportations.
Cette réunion fut suivie de celle conjointe du Conseil du gouver-nement et de Comité Central du M.R.N.D., afin d'arriver à un
consensus sur la gravité de la crise et des mesures à prendre immédiatement.
Entre-temps, le Ministère des Affaires Etrangères et de la Coopération Internationale avait convoqué la Communauté des Bailleurs
Bilatéraux, pour explorer avec eux la possibilité d'emprunter, aux conditions concessionnelles habituelles et dont nous étions
prêts à garantir prioritairement le remboursement, un certain montant de devises fraîches, relativement modeste, mais indispensable
pour ne pas compromettre nos efforts de croissance et de développement.
Mais tout accès à des devises nouvelles ne pouvait plus se faire autrement que via le passage obligé par des instances dites de
Bretton Woods, comme nos amis bilatéraux, dont certains ont pourtant fait l'impossible pour nous donner un appui spécifique à la
balance des paiements, nous l'ont fait comprendre.
C'est ainsi que j'ai décidé de dépêcher à Washington une mission de très haut niveau, dirigée par le Ministre à la Présidence
de la République, Monsieur Siméon NTEZIRYAYO, composée du Ministre des Finances et du Gouverneur de la Banque Nationale du Rwanda,
avec comme mandat d'explorer la possibilité de concevoir, de concert avec les institutions de Bretton Woods, un programme économique, permettant à notre économie de retrouver la voie de la croissance.
C'est ainsi que j'ai écrit dans ma lettre du 30 décembre 1989 adressée au Directeur Général du Fonds Monétaire International,
Monsieur Michel CANDESSUS que (je cite) "le Rwanda aimerait explorer (…)la possibilité de négocier un accord de politique économique
nationale, qui lui permettrait de sauve-garder l'essentiel de sa gestion, tout en la renforçant " ; j'ai aussi ajouté (je cite)
que "nous préférons parler d'un accord sur la politique économique nationale puisque (…) le Rwanda a, depuis longtemps déjà, mis
en place, grâce à un effort de cohérence et de rigueur de tout instant, et à la participation active de la coopération
internationale, et continue à mettre en place, les mesures de restructuration et de stabilisation nécessaires à son
auto-développement, et qu'il a toujours jugées comme faisant partie intégrante de toute bonne stratégie de développement
national " (fin de citation).
Et dans ma lettre au Président de la Banque Mondiale, Monsieur Barber C. CONABLE, j'ai mis en évidence le souci du Rwanda
de "prévenir une aggravation de la situation, en essayant de mobiliser de son côté certains des atouts que le système multilatéral
de coopération prévoit, afin que ses efforts de restructura-tion et de relance économiques, entrepris d'une manière systématique
et cohérente depuis longtemps, ne soient un jour brutalement compromis " ; j'ai ajouté que c'est pour cette raison que le Rwanda
tient à explorer, avec la Banque Mondiale, "un programme spécial de croissance permettant d'imprimer à son économie un rythme de
croissance élevé grâce à un apport concentré de devises dans un certain nombre de domaines stratégiques " (fin de citation).
A ces deux hauts responsables, j'ai également exprimé la conviction du Rwanda selon laquelle aujourd'hui, plus que jamais, et
dans l'intérêt de tout le monde, des solutions flexibles, innovatrices, devraient être recherchées et qui accorderaient la plus
haute importance à la responsabilité nationale et à la prise en charge, en toute transparence, par les forces nationales
elles-mêmes, appuyées en cela par une coopération repensée, des exigences qu'impose la poursuite conséquente de la voie nationale
choisie, afin que les solutions éventuelles soient compatibles avec nos convictions en matière de politique économique et qu'elles
s'intègrent parfaitement bien dans nos priorités économiques, sociales et financières.
Cette première mission s'est donc rendue durant les fêtes de fin d'année 1989 à Washington afin d'entamer les négociations avec
ces institutions. Elle a reçu un accueil encourageant qui a permis de mettre au point un échéancier de négociation, et cela toujours
dans le plus strict secret, afin de ne rien compromettre et d'éviter toute spéculation contreproductive.
C'est ainsi qu'a commencé le long processus de négociation qui a duré presque dix mois, qui a vu la délégation ministérielle
se rendre quatre fois à Washington, mais qui finalement abouti à la conclusion d'un accord avec ces institutions dont nous pouvons
être satisfaits.
J'aimerais féliciter ici très chaleureusement toute l'équipe ministérielle rwandaise, mais aussi l'équipe constituée par la
suite des techniciens, pour l'excellent et combien épuisant travail qu'ils ont fourni, durant presque une année, avec grande
abnégation et beaucoup d'enthousiasme, dans l'intérêt majeur de notre pays.
Si j'ai tenu, Militantes et Militants, à vous relater rapidement l'historique de cette négociation, c'est essentiellement
pour démontrer la volonté de votre Gouvernement de ne jamais négliger aucune possibilité, ni réelle ni prospective, qui s'offre
en faveur du développement national, pour vous prouver aussi son acharnement à trouver les meilleures solutions possibles pour
son économie, mais aussi pour vous faire part des difficultés parfois énormes qui ont précédé la conclusion de l'accord, et qui
nous permettront de mieux apprécier finalement le résultat obtenu.
En effet, si les négociations ont pris autant de temps, c'est pour plusieurs raisons, et notamment que nous ne pouvions pas
faire table rase de tout ce que le Gouvernement avait déjà mis en place, ni des priorités qui sont celles de notre
auto-développement, ce qui exigeait un effort de conception original de notre part et de la part de nos partenaires.
Enfin, il était évident, pour chacune des parties, que si un accord sur un programme de croissance devait être conclu et
connaître le succès escompté, cela ne pourrait être le cas que si le gouvernement est en mesure de garantir la réalisation de
ce à quoi les négociations auront abouti ; en d'autres termes, le gouvernement ne pouvait évidemment s'engager qu'à ce qu'il
pouvait raisonnable-ment garantir de réaliser, ce qui excluait toute inclusion dans le programme-cadre de politique économique
de mesures ou de principes dont l'exécution ne pouvait être garantie ni envisagée.
C'est ainsi que je suis heureux aujourd'hui de pouvoir dire que nous avons réussi à conclure un accord qui ne pourra que
renforcer notre politique économique et la remettre sur les rails de la croissance.
Je tiens à saisir cette occasion pour exprimer aux responsables de ces deux institutions, en particulier, au Directeur Général
du F.M.I. ; , Monsieur CANDESSUS, et au Président de la Banque Mondiale, Monsieur CONABLE, notre vive appréciation pour leur
disponibilité et leur compréhension qui nous ont permis d'entamer ces négociations dans un esprit emphatique qui en aura
conditionné le succès ; je tiens aussi à présenter, nos remerciements sincères à toutes les équipes de ces deux institutions
pour leur ouverture d'esprit et leur participation active et combien constructive.
Militantes et Militants Députés !
Permettez-moi maintenant de commenter brièvement les mesures principales de l'accord signé avec les institutions de Bretton
Woods.
Il y a d'abord la dévaluation de 40 pour cent du Franc rwandais en monnaie étrangère.
Cette dévaluation est devenue inévitable, et cela depuis que le prix mondial du café était tombé de 55 cents le kilo, soit
depuis à peu près une année. C'est donc seulement depuis une année que pour la première fois, depuis 1983, notre monnaie est
devenue ce que l'on pourrait appeler déficitaire par rapport à sa fonction dans l'économie nationale.
Cela n'a jamais été le cas auparavant, et c'est pourquoi le Gouvernement s'est toujours refusé de procéder à un ajustement
monétaire, dans le sens d'une dévaluation, simplement parce que, au fond, rien ne le justifiait, la stabilité monétaire, pour
une économie comme la nôtre, étant primordiale, et cela pour tant de raisons.
En réalité, l'intérêt intrinsèque de notre économie aurait exigé de procéder à une dévaluation dès le mois d'octobre 1989,
puisque, même avec les politiques d'austérité les plus rigoureuses nous n'aurions pu combler le déficit des finances publiques,
entraîné par l'écroulement du prix mondial du café.
Si nous ne l'avons pas fait à ce moment-là, alors que cela eût pu être dans l'intérêt propre de notre économie, c'est que,
les négociations avec les institutions de Bretton Woods devenant inévitables, nous préférions garder cet élément comme un élément
de négociation majeur.
La chute continuelle et dramatique du dollar ayant entraîné sa dépréciation inéluctable par rapport à la plupart des monnaies
y compris le Franc rwandais, il ne restait qu'un moyen de nous opposer à cette déperdition massive de la valeur du dollar, c'est
de lui donner plus de valeur en Francs rwandais, afin de rétablir une valeur acceptable de la contrepartie en Francs rwandais de
nos exportations de café.
Cela nous venons de le faire en dévaluant notre monnaie de 40 pour cent, afin de redonner au dollar une valeur acceptable en
Francs rwandais.
Le nouveau taux de change du Franc rwandais redonnera à notre monnaie cette nouvelle stabilité, durable, et parfaitement
intégrée aux exigences de notre croissance économique, et qui a toujours fait, et qui fera toujours la force de notre monnaie.
Elle permettra en particulier aux industries exportatrices d'améliorer leur performance et de capitaliser l'effort intensif
et conscient investi, depuis quelques années, dans la promotion des exportations, ainsi que de rétablir l'équilibre des finances
publiques qui ont été mises à mal depuis que notre café subit de plein fouet la crise internationale.
L'introduction d'un système plus libéral d'octroi de licences répond d'évidence au souci maintes fois exprimé par le
Gouvernement et par tous nos amis de faciliter la concurrence et de favoriser la meilleure allocation possible des ressources.
Le Gouvernement, conscient de l'importance extrême de maîtriser les relations économiques extérieures, a investi beaucoup
d'effort dans la prévision et la gestion des importations au point que l'on peut affirmer que c'est un domaine aujourd'hui
parfaitement bien connu.
Si l'exercice de la prévision de nos importations garde toute son importance, la préaffectation , en revanche, des devises
ne concernera plus que les produits de première nécessité comme les produits pétroliers, le sucre, le sel, le lait en poudre,
la semoule, le malt et le houblon, les huiles de palme et de soja, les produits pharmaceutiques, les engrais minéraux, les
produits phytosanitaires et le gypse, essentiellement dans la production du ciment.
Pour les autres produits, les licences d'importations seront octroyées en fonction de la disponibilité de devises, leur
répartition favorisant les biens d'équipement, ceux des produits intermédiaires, ainsi que des produits de rechange et autres,
essentiels au maintien et au renforcement de la capacité de production nationale.
Désormais, les demandes de licences d'importation feront l'objet d'une commission forfaitaire irrécupérable de cinq pour cent
de la valeur des licences qui doit avoir été versée au trésor public au moment de dépôt de la demande de licence au Ministère du
Commerce et de la Consommation, lequel s'assurera que la commission a été payée.
La Banque Nationale affectera chaque une fois par mois les montants de devises à octroyer en fonction de leurs disponibilités.
Nous espérons ainsi pouvoir tabler sur les acquis de la gestion des importations, tout en franchissant un nouveau pas vers un
système que nous avons toujours voulu de plus en plus libéral, tout en répondant aux intérêts bien compris de notre économie.
Le nouveau système permettra aussi d'améliorer encore plus la transparence dans la gestion de nos licences, cette transparence
pour laquelle nous nous sommes toujours battus, par la publication mensuelle des devises disponibles, de la liste des importateurs
comprenant leurs demandes et les montants des devises allouées par importateur, la commission de recours, présidée par le MINICOM,
continuant, bien entendu, à fonctionner.
Afin de compenser la réduction voire l'élimination des taxes à l'exportation, mais aussi pour favoriser l'utilisation des
ressources nationales, le droit d'entrée minimal qui était de 5%, sera porté à 10%.
Par la même occasion sera simplifiée la structure du régime douanier. Le nouveau régime douanier aura un nombre de taux réduit,
ce qui facilitera la vie aux opérateurs économiques, mais aussi celle de l'administration, et introduira plus de transparence ;
pour ces mêmes raisons, toutes les taxes spécifiques seront transformées en droits ad-valorem, à l'exception cependant de certains
produits, comme les boissons, les cigarettes et les produits pétroliers.
De pair avec ces mesures permettant d'accroître l'assiette fiscale, et qui seront complétées, entre autres, par l'amélioration
de l'administration fiscale et du recouvrement, ira la politique budgétaire qui conduira évidemment à répondre aux exigences de
rigueur, voire d'austérité, mais qui sera désormais, comme nous n'avons cessé de le réclamer, soumise à des critères très stricts
d'équilibre intrinsèque et de planification pluriannuelle.
Certaines modifications en matière de fiscalité sont devenues inévitables, en particulier la révision de l'impôt sur
le chiffre d'affaires, l'ICHA.
Cette révision, déjà demandée par les opérateurs économiques et les députés, tiendra compte des améliorations par eux proposées,
comme l'élimination des stocks et l'importation en cascade, l'exonération des équipements industriels destinés à un investissement,
mais elle permettra aussi d'élargir l'assiette fiscale par le calcul basé désormais sur le prix de vente, par la taxe portée de six
(6) à dix (10) pour cent pour la plupart des biens, et son uniformisation pour les services et les spectacles.
Comme toutes ces mesures entraînent évidemment une certaine augmentation des prix d'un certain nombre de produits, ayant un
contenu importé et étant sujets à un régime fiscal plus sévère, il a été possible d'envisager la suppression du système actuel
de contrôle des marges bénéficiaires, à l'exception des monopoles.
En effet, le pouvoir d'achat sera soumis à des fortes pressions, ce qui ne pourra agir comme un régulateur naturel des prix,
et par là des marges bénéficiaires, et donc comme une incitation à la modération des hausses de prix.
Grâce à cela, nous pensons avoir fait un pas en faveur de moins de tracasseries administratives, ce qui a, comme vous le savez,
toujours été l'un de nos objectifs majeurs, en toute chose.
Dans notre stratégie, de tout temps, visant à promouvoir un climat incitatif à la promotion des activités de production, le
Code des investissements occupe une place importante. Sa révision, en 1987, avait permis d'en améliorer les principes
d'admissibilité et de flexibilité en fonction de la qualité des investissements envisagés par rapport aux priorités nationales.
Si ces nouveaux principes ont permis d'en améliorer la portée, les textes, en revanche, fixant les avantages apparaissent
aujourd'hui comme exces-sivement généreux, bien qu'ils répondissent à l'époque aux conseils nous prodigués dans certains quartiers.
Un moratoire sur les exonérations accordées dans le cadre du Code des investissements, moratoire effectif dès maintenant,
permettra de procéder à la révision, plus conforme aux intérêts de l'économie, des avantages prévus dans le Code des investissements.
Enfin, un dernier mot, sur la nouvelle politique du crédit et des taux d'intérêts.
Les accords signés avec les institutions de Bretton Woods prévoient, pour le système des banques commerciales, la fixation
du taux créditeur pour les dépôts à un an à 12 %, un taux de refinancement unique fixé à 14%, un taux débiteur maximal de 19%,
ainsi que l'abolition de tous les taux préférentiels et la détermination libre des taux pour tous les autres dépôts et emprunts.
Les nouveaux taux créditeurs et débiteurs pourraient surprendre ; nous avons réussi à modérer les conditions, bien plus
draconiennes initialement, autant que cela fut possible, car il s'agissait d'éviter de désarticuler le fonctionnement de notre
économie. Leur justification tient, selon nos partenaires, au besoin de renforcer la politique monétaire restrictive poursuivie
par le Gouvernement et de moduler en conséquence la croissance du crédit intérieur. Il s'agissait aussi de veiller à une certaine
harmonie entre les crédits impliquant des investissements en devises et la disponibilité de ces dernières.
Evidemment, les accords signés prévoient que d'une commune entente des dispositions prises peuvent être modifiées, si la
situation l'exige.
Voilà ce que j'avais à dire au sujet de certains des paramètres importants de la relance de notre économie. Il y en a bien
d'autres, mais ce que je viens d'exposer concerne ce qui est le plus important.
Toutes ces dispositions feront l'objet d'explications de la part des responsables chargés des divers domaines, et seront
traduits par des arrêtés présidentiels ou ministériels, ainsi que par des règlements spécifiques émanant de la B.N.R .
Dans ces dispositions de relance de notre croissance, cinq lois doivent être changées, quatre dans le domaine du tarif
douanier et celle concernant l'ICHA.
Je voudrais vous inviter, Mesdames et Messieurs les Députés, d'étudier dans les meilleurs délais les cinq projets de loi
qui vous ont été soumis, afin que nous puissions démarrer immédiatement la relance de notre économie.
Militantes et Militants !
Le programme-cadre consacré à la relance de la croissance économique, que nous avons signé avec les institutions de Bretton
Woods, n'est pas du tout un catalogue de mesures disparates ; c'est en réalité un tout assez cohérent nous permettant de nous
assurer des meilleurs atouts possibles pour compenser la chute catastrophique de nos recettes d'exportation, et que personne
ne peut imputer à une mauvaise gestion de notre économie.
L'accord conclu est un accord certainement innovateur. Ainsi, il n'y a ni pénalisation des producteurs, ni renvoi de
fonctionnaires, ni destruction de nos acquis.
La stimulation de la relance économique telle que le programme-cadre y relatif conclu la prévoit, sera appuyée en plus par
d'autres initiatives importantes prévues par le Gouvernement, tels le Fond d'héritage, diverses initiatives en matière
d'investissement, afin de nous garantir les meilleures chances de réussite de notre développement économique.
Evidemment, ce programme de relance économique nous imposera des sacrifices ; chacun devra faire des sacrifices.
Rappelons-nous que quoi que nous fassions, cette crise économique qui s'abat sur les économies africaines depuis quelques
années, nous a déjà imposé, et continuera dans tous les cas à nous imposer des sacrifices et des concessions. Ces crises ont
le don de nous rappeler, cruellement, mais implacable-ment, nos devoirs.
C'est en vue d'alléger les difficultés sociales qui inévitablement vont se produire pour la quasi totalité de notre
population, c'est en vue de concentrer précisément une très grande partie des ressources nouvelles dont nous disposerons dans
le développement social que le Gouvernement concevra un programme massif de développement social qui sera ciblé sur la
réalisation des objectifs de développe-ment social que nous nous sommes donnés pour la présente législature, conformément au
Discours-programme.
Ce programme qui touchera en particulier les domaines de la santé, de l'éducation, de la nutrition et de l'emploi, ainsi
que le développement communal, fera l'objet d'une déclaration gouvernementale spéciale, tant est grande l'importance que nous
y attacherons.
J'aimerais terminer ce que j'avais à vous dire aujourd'hui au sujet de la relance impérative de notre économie par une
réflexion et un appel.
La réflexion a trait à l'opportunité que présentera pour nous, au fond, cette crise. Cette crise, Rwandaises et Rwandais,
nous permet de redémarrer sur une base nouvelle, assainie, véritablement porteuses d'avenir dans la mesure où nous avons la
possibilité de nous débarrasser des scories qui commençaient à obstruer notre société.
Si nous sommes en mesure de nous montrer à la hauteur de la situation et que nous démarrions, consciemment, avec la volonté
et l'esprit d'un renouveau spirituel - ce renouveau spirituel dont je veux qu'il marque cette législature - vraiment , Militantes
et Militants, l'avenir ne pourra que nous rassurer.
L'appel, j'aimerais le lancer aux pays amis du Rwanda qui n'ont jamais cessé de nous accorder leur soutien.
Plus que jamais, aujourd'hui, nous avons besoin de leur appui. J'aimerais aujourd'hui les inviter chaleureusement, et d'une
manière pressante, à appuyer vigoureusement et massivement notre programme de relance économique, tel que l'accord signé avec
les instances de Bretton Woods la prévoit, et notamment le programme social auquel nous voudrions les voir participer très
activement.