Quelques documents importants relatifs aux facettes du génocide rwandais.
La lettre du général Rusatira au secrétaire général du F.P.R.
(Parue dans Forum Rwandais N° 3, Juillet 1999 sous le titre: Traduction de ma lettre du 07 juin 1999
Son Excellence Dr Charles Murigande
Secrétaire Général du FPR
B.P. 195 Kigali-Rwanda
Monsieur le Secrétaire Général,
J'ai eu l'occasion de lire votre communiqué de presse du 10 mai 1999 concernant le comportement de l'association IBUKA. Ce document
m'a poussé à m'interroger une fois de plus sur le calvaire du peuple rwandais. J'ai dès lors décidé de manifester mon intérêt, car
une telle prise de position de la part du FPR ne pouvait me laisser indifférent.
La première question gui vient à l'esprit après la lecture de ce communiqué est de savoir pourquoi le FPR a dû attendre si
longtemps pour enfin dénoncer les crimes qui ont déjà emporté des multitudes, pendant que d'autres étaient jetées en prison à cause
de la haine et des dénonciations calomnieuses. Pourquoi ces bons principes, bien que toujours loin d'être concrétisés, ont-ils dû
attendre cinq ans pour être proclamés ? Pendant tout ce temps, il y a eu d'innombrables emprisonnements sans cause, des assassinats
et même des massacres, des expropriations de force et des spoliations, des milliers de personnes ont fui leur pays à cause de leur
appartenance ethnique, leurs opinions ou leurs propriétés. Des innocents sont sciemment confondus avec des criminels du simple fait
qu'il y a eu des criminels parmi les hutu. Les tutsi non extrémistes sont considérés comme des ennemis. La vie n'a plus de valeur au
Rwanda et dans son voisinage. La population est sans défense, sans espoir de salut. Et pourtant il y a au Rwanda un gouvernement et
d'autres institutions qui normalement devraient rassurer tous les honnêtes gens. L'état de droit est totalement absent. La paix et
la sécurité ont déserté les villes et les collines du Rwanda. Le FPR a "détruit, au lieu de convertir ", il a gagné la guerre tout
en perdant la paix.
Malgré ce schéma d'un bilan complètement négatif et catastrophique, je ne peux pas ne pas vous féliciter et vous soutenir pour le
courage dont vous avez fait preuve en dénonçant quelques mauvais agissements. Pourvu que ces bons sentiments soient traduits en
actes concrets.
constitués en coopératives de délation et de meurtre contre des personnes de bonne foi. Ils trahissent ainsi la noble cause de
défense des rescapés, mais seraient-ce ces fanatiques de IBUKA qui tuent partout dans le pays, dans les quartiers comme sur colline,
qui terrorisent toute la population, qui pillent ou s'approprient les biens d'autrui ? Est-ce IBUKA qui a paralysé tout le système
judiciaire ? Est-ce cette association qui exerce une menace constante sur les magistrats qui fuient le pays sans cesse ? IBUKA
serait-elle un Etat dans l'Etat ou le vrai problème entre le FPR et son IBUKA ne serait-il pas la simple différence dans le modus
operandi, le programme commun restant le même ou ne serait-ce pas une lutte d'influence sur les rescapés ?
Le FPR aurait dû d'emblée déclarer et mettre en application ces bons principes dès sa prise du pouvoir. Tous les criminels sans
exception, devaient être poursuivis, aucun innocent n'aurait dû être inquiété ou interné. La justice aurait défendu les rescapés et
protégé toutes les victimes du mensonge, de la haine et de l'esprit revanchard, et de la discrimination ethnique. Le chagrin et la
souffrance sont compréhensibles, mais faut-il leur sacrifier des gens qui n'ont rien à se reprocher à cause de cet amalgame encouragé
et même entretenu par les plus hautes autorités de l'Etat ? Si le FPR s'était montré digne du grandiose enjeu de reconstruction
nationale, tous les Rwandais de cœur se seraient déjà retrouvés pour refaire la vie ensemble dans le souvenir de leurs disparus à
cause de la guerre et du génocide, mais aussi dans l'espoir de meilleurs lendemains. La paix serait revenue au lieu de céder la
place à la terreur qui a traumatisé toute la population et qui a fait du pays une terre de tous les dangers. Tous les citoyens
auraient reçu la carte d'identité au lieu d'être pourchassés, comme ils le sont aujourd'hui, comme du gibier à cause de leur origine
ethnique ou régionale. La réconciliation nationale, tant combattue par ceux qui ont peur de devoir un jour partager le pouvoir
politique et économique avec les autres, ne serait plus un objectif lointain, si pas inaccessible. Les rescapés de la guerre, des
massacres et du génocide auraient commencé à réapprendre la vie commune dans le pardon et la tolérance, comme ne cessent de le
prêcher les confessions religieuses à des oreilles distraites. La Société civile aurait retrouvé ses droits pour poursuivre son
rôle de porte-parole des faibles et des laissés pour compte, tout en épaulant les pouvoirs publics pour l'amélioration des conditions
de vie socio-économique et spirituelle de la population.
Il vous appartient vous-même d'évaluer les réalisations du FPR pour constater que nous sommes loin du compte. Non seulement rien
de bon n'a été accompli, mais tout a été détruit avec l'homme qui en avait été l'artisan. Les infrastructures socio-sanitaires, de
communication, l'habitat rural, la plupart des moyens de production pourtant acquis à prix fort, rien n'est pratiquement plus en
état sauf dans les régions privilégiées de la classe dirigeante.
Tous les discours ne sont que de la propagande, toutes les multiples réunions tenues par les hautes autorités soi-disant pour
débattre de la réconciliation et de l'unité nationale sont sans aucun effet bénéfique pour la population. En outre, il n'est pas
permis d'y dire la vérité en rapport avec les réalités du terrain et la misère des gens. Seuls la langue de bois, le clientélisme
et la terreur s'y donnent libre cours. Des décisions y sont prises qui reflètent la loi du plus fort et qui dissuadent toute
velléité de dialogue et d'ouverture. Les arrestations injustifiées, telles que celle de Messieurs André Nkeramugaba, Bonaventure
Ubarijoro, de (Hyperlink encore 4ans de …) Monseigneur Augustin Misago, évêque de Gikongoro, poursuivi pour ce qu'il représente et
non pour ce qu'il aurait fait,.. sont parmi les abus sans scrupules de ces rencontres politiques transformées en guet-apens.